Dominique  Aubier

La Connaissance de l’Universel

Portrait de l’Auteure

 

Portrait de l’auteure
par Jérôme Lecoq, journaliste
paru dans la Dépêche, le 14 janvier 2011

 

 Dominique Aubier
L’érudit de Damville

À 88 ans, Dominique Aubier a un parcours hors du commun. Résistante, auteur d’une quarantaine d’ouvrages, kabbaliste… Rencontre à Damville, avec une érudite au savoir troublant.

Une rencontre avec Dominique Aubier ne peut laisser indifférent.
Lorsque l’on discute pour la première fois avec cette femme de 88 ans au regard vif et au verbe agile et précis on se sent un peu comme l’initié face à son gourou. Ou à sa divinité.
Puis rapidement, on se rend compte que cette première impression était faussée. Car si Dominique Aubier œuvre loin des sentiers battus et emprunte les voies du mystique, de l’ésotérique, c’est en réalité plus une scientifique de l’irrationnel qu’un gourou qui tenterait d’imposer sa doctrine.

Scientifique de l’irrationnel

Son domaine de compétences ? La Vie. Et tous les signes qu’elle nous envoie : coïncidences, analogies, ressemblances, succession d’événements… Tous ces petits détails qui peuvent nous interpeller par moments mais que, bien souvent, nous ne remarquons pas.

L’épisode neigeux de ces derniers jours ? Un signe pour nous faire prendre conscience de la situation actuelle. « La neige, et le chaos qu’elle a provoqué, notamment à Paris signifie que l’esprit occidental est perdu dans une situation qu’il ne maîtrise pas. La neige ne part pas. La nécessité de savoir où nous en sommes est de plus en plus urgente et insistante. »
Tous ces détails parlent à Dominique Aubier, font sens. Son secret ? Elle le livre elle-même, comme une indication à suivre : « Je m’intéresse passionnément à tout ce qui m’arrive. Je suis un flic pour moi-même. Une vigilance de détective privé pour analyser toutes les données de la vie. Je conseille à tout le monde d’écouter son cœur. »

Grandir dans un désert idéologique

Dominique Aubier, de son vrai nom Marie-Louise Labiste, vit le jour le 7 mai 1922 à Cuers, dans le Var. De cette enfance, elle a gardé un léger accent provençal, mais surtout une perception accrue de la vie.

Dans une famille très modeste, « pauvre de ne pas avoir de pensée familiale, à part un catholicisme de village de formalité plus que d’idéologie », elle a su cultiver son jardin. Se fiant toujours à ce qu’elle pouvait ressentir.
Elle le dit elle-même, « la pauvreté familiale a été mon trésor. » Un trésor dont elle a su tirer une grande soif de savoir.
Excellente élève, elle obtient une bourse et part étudier à Nice.

Son passé de résistante

Pourtant ce n’est pas à l’école qu’elle se construira. « J’allais en classe comme on va au marché. En remplissant ma bourriche de tout ce qu’elle pouvait transporter. Mais ma pensée était ailleurs. »
Marie-Louise a 17 ans lorsque la guerre éclate. Elle rejoint la Résistance à Grenoble. C’est là qu’elle prend le pseudonyme de Dominique Aubier, et rencontre celui qui deviendra son mari. Le médecin Genon Catalot, avec qui elle aura deux enfants. Avant de divorcer, en 1958.
En 1945, à 23 ans, elle publie un recueil de nouvelles, Histoires de résistante. Au début des années cinquante, Dominique Aubier publie six romans aux éditions du seuil dont Le Maître-Jour.

La rencontre avec Don Quichotte

Petite, comme aujourd’hui dans son bureau où les murs sont tapissés d’ouvrages, Dominique a toujours été entourée de livres. Mais si elle lit beaucoup, jamais elle n’avait eu la sensation de se retrouver dans un auteur, avant une rencontre capitale qui se produira à la lecture de Don Quichotte. « J’ai toujours subi l’étrangeté de l’auteur, je ne me suis jamais confondu avec un livre. Ma découverte de Don Quichotte a été cruciale. C’est une ouverture d’esprit incroyable lorsqu’un livre vous livre le langage de votre cœur. À ce moment-là, ce n’est plus un livre, c’est un guide. »
 Après son divorce, en 1958, elle fait la rencontre du cinéaste italien Roberto Rosselini qui l’invite en Italie, tout en l’incitant à poursuivre ses recherches sur Don Quichotte.
En 1960, en pleine époque franquiste, elle part vivre en Espagne et s’installe à Carboneras, dans la province d’Almeria.

Dominique Aubier, kabbaliste

De l’œuvre de Cervantes, elle réalise plusieurs analyses très détaillées. En 1966, elle publie aux éditions Robert Laffont Don Quichotte prophète d’Israël. Un ouvrage qui défend une lecture selon laquelle le roman serait codé à partir de la kabbale.

Prenant racine dans les traditions ésotériques du judaïsme, la kabbale peut se définir comme un ensemble de spéculations métaphysiques sur Dieu. Étymologiquement, le mot kabbale signifie réception et peut-être interprété comme « la sagesse de recevoir ».

C’est de cette tradition que Dominique a tiré l’essentiel de son savoir. Ou plutôt, les outils avec lesquels elle analyse, telle une scientifique, le monde qui l’entoure. Même si elle reconnaît que cela a pu la décrédibiliser, notamment auprès des médias : « On ne m’a pas pardonné d’utiliser des mots hébreux pour donner une explication du monde qui nous entoure. Pourtant, pour moi, c’était une évidence. »

À Damville et « les moulins de Don Quichotte »

En 1989, elle publie La Face cachée du Cerveau. Un ouvrage qui rapproche traditions ésotériques et découvertes scientifiques et propose une description du cerveau. Au total, elle publiera une quarantaine d’ouvrages.
Aujourd’hui, Dominique Aubier vit à Damville. À quelques centaines de mètres des cinq éoliennes dont elle se réjouit de voir tourner les pales « comme les moulins de Don Quichotte ».

Presque chaque jour, elle reçoit des lettres de lecteurs se disant « bouleversés » par ses écrits. Mais depuis 2008, et une varicelle violente qui lui paralysa le bras droit, Dominique Aubier n’écrit plus.

Elle n’a pas pour autant abandonné ce qu’elle considère comme « un devoir de transmission. » Elle a simplement changé de méthode et réalise aujourd’hui des films pour, dit-elle « rester dans la communication d’esprit à esprit. Aujourd’hui, les gens qui me lisent apprécient ce contact, encore plus avec les films que par les livres où le langage subtil des gestes, du visage intervient. »

Dominique Aubier n’est pas le gourou d’une secte, même si les notions qu’elle emploie sont empreintes de mysticisme. Elle est plutôt le porte-parole d’une connaissance, certes ésotérique, mais travaillée, élaborée, construite par une soif intense de savoir, d’un besoin profond d’interpréter le monde qui nous entoure. En cela, Dominique Aubier est une érudite.

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